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Arrêt sur image

Scrutons une seconde ce triple portrait : deux Vincent Roux et une femme. Celle-ci, Yolande Brawanska, fut, dans les années 60, l'un des modèles favoris du peintre. Celui-ci, par la grâce d'un photographe que nous n'avons pu identifier, nous présente ici son double visage. Le profil droit, tendu, volontaire, est celui d'un homme entièrement mobilisé par l'œuvre qu'il fait naître, tout en restant terriblement attentif au visage que cette œuvre capture et dévore. Il est l'Artiste.

Le profil gauche, reflété par la glace, est celui d'un être un peu hésitant et facilement blessé qui reste proche de l'adolescent qu'il fut. Charmant, caressant, un peu timide, il est l'Homme-enfant. N'en doutons pas : la cohabitation entre ces deux personnages n'est pas toujours aisée. Difficile d'être doté d'un alter ego si sûr de lui qu'il en devient dominateur.

Mais ne dissertons pas sur cette scène de ménage fort connue ("Ô toi, Narcisse aimé, quel drôle de couple tu fais !") Retenons simplement ceci : l'éternel ado qui, jusqu'à la fin, cherchera et se cherchera est doublé d'un artiste au métier assuré. Désertant volontiers le décorum de ses ateliers, il peint n'importe où (piscines comprises), mais ne peint jamais n'importe comment. Vingt fois sur le métier il remet son ouvrage (nous montrons ici l'une des premières esquisses, si pleine d'allant, de l'Autoportrait au turban vert qu'on trouvera plus loin). Il travaille tout particulièrement ses dessins, avec cette sûreté de main et ce goût du fini qu'attestent ses costumes pour le Figaro de Marseille. Sur un cliché qui le montre à l'œuvre dans sa toute dernière période, on croirait que (mimétisme ?) la photo elle-même s'est faite épure.

Jean-Michel ROYER

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